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Souffrance, travail et banalisation du mal

  • Martha Bernardo
  • 12 mai 2020
  • 12 min de lecture

Dernière mise à jour : 17 août 2020

I. Fonctionnalisme et banalisation du mal

La situation s’est aggravée, parce qu’aucune mesure n’a été prise ni en France ni à l’étranger pour favoriser, en matière d’organisation du travail, les choix qui pourraient être nettement moins délétères pour la santé mentale de nos contemporaines (DÉJOURS, 1998 ; p.I)

	« Souffrance en France » est un livre sur les nouvelles organisations du travail sous le néoliberalisme et sur les mécanismes qui produisent la servitude volontaire dans le monde contemporaine. Ces nouvelles organisations génèrent une pauvreté croissante et, par conséquent de nouvelles formes de violences sociales. Déjours signale que l’objet du livre n’est pas l’entreprise néoliberale, mais un questionnement de la tolérance social envers l’évolution de l’organisation du travail : « le principal ici posé est celui de la tolérance incroyable de nos contemporains au progrès de l’injustice sociale en régime libéral ».(DÉJOURS, 1998 ; p.III). 
	Déjours écrit contre les fonctionnalistes, pour qui l’évolution de l’organisation du travail serait « inexorable », « elle serait le fait d’une logique endogène propre au système, c’est-à-dire propre à l’economie, au marché, à la mondialisation, au système financier international…,  à la guerre économique, en somme, qui s’imposerait comme une fatalité, contre laquelle on n’aurait d’autre choix que triompher ou périr » (DÉJOURS, 1998 ; p.III). La thèse fonctionnaliste produit une naturalisation de la situation du travail qui n’est pas comprise comme une injustice social, mais comme soumise au fonctionnament des agents économiques, comme le marché. 
	À la centralité du marché dans les analyses économiques, Déjours oppose l’analyse fondée sur l’individu. Plus précisement, elle a comme objet des données recueilli de la clinique du travail, c’est-à-dire, qu’elle est basé sur des « faits ». Ces faits serviront à comprendre le comportement des individus sous le néolibéralisme. Le choix de l’individu comme objet de réflexion a aussi pour cause sa centralité dans l’organisation du travail. 
Tout système, toute organisation, toute entreprise a, et aura toujours, besoin du génie de l’intelligence au travail pour fonctionner. C’est pourquoi on peut affirmer que l’entreprise néolibérale et le système économique lui-même ne fonctionnent jamais par l’óperation de leur seule logique interne. Il y faut l’appoint du travail vivant. Mais le travail vivant repose sur la liberté de la volonté. Force est donc d’admettre que le système néolibéral même s’il fait souffrir ceux et celles qui travaillent, ne peut maintenir son efficacité et sa stabilité que grâce au consentement de ceux-là et de celles là qui le servent. (DÉJOURS, 1998 ; p.IV)

	La thèse de Déjours, qui nie la thèse fonctionnaliste, est que l’injustice social subie par les individus a pour cause un comportament : le consentiment. L’idée appartient à la tradition libertaire, dont Etienne la Boétie aparaît comme un prédecesseur : « en d’autre termes, ce livre procède à l’examen des voies spécifiques qu’emprunte la servitude volontaire dans le contexte du système néoliberal » (DÉJOURS, 1998, p.IV). La question que La Boétie formule est justement comment tous les hommes peuvent servir volontiers à un seul homme, le tyran. La question de Déjours est comment tous peuvent consentir avec l’injustice de l’organisation néolibérale du travail, considerée comme la seule entreprise viable. 
	Cette naturalisation de l’injustice, que Déjours utilise pour penser l’idée d’une banalisation du mal, a été constaté dans son travail comme médecin. 

Le mal était indiscutiblement à l’ordre du jour, avec cette particularité d’y apparaître sans travestissement, sans « complexe » (…) J’avais besoin de ce concept pour discuter la thèse de la « banalité du mal » d’Arendt, et surtout pour avancer l’idée d’une « banalisation » du mal dont mes détracteurs étaient, il faut bien l’admettre, souvent les témoins placides. (DÉJOURS, 1998 ; p.VIII)

	Les fonctionnalistes attaquent Déjours en affirmant que la banalisation du mal est un concept attardé, qui ne comprend pas le « réalisme économique » qui est au-délà du bien et du mal. 
C’est que révèle mon enquête sur la servitude volontaire en système néolibéral, c’est que la majorité des gens peut être enrôlée au service d’un système dont pourtant elle désapprouve profondément les méthodes. Et elle montre – c’est ce qui est le plus frappant – que la mobilisation peut être obtenue sans usage de la force. (DÉJOURS, 1998 ; p.IX)
I Le mal
	Il est commument partagé que les victimes du chômage sont en situation de souffrance, parfois physique et sociale. Mais il n’est pas partagé que ces victimes souffrent aussi d’une injustice social. Pour Déjours il y a, dans le monde contemporaine, une clivage entre souffrance et injustice sociale. Ce clivage ne considère pas les rapports entre les deux termes en question. Dans le cas du chômage, la souffrance est liée à des reactions de compassion, de pitié ou de charité, mais non de mobilisation sociale. Ce clivage rend donc invisible la réaction politique. Cette même posture conduit à une attitude de résignation face à l’injustice subi. 
Résignation  face à un « phénomène » : la crise de l’emploi, considerée comme une fatalité, comparable à une épidémie, à la peste, au choléra, voire au sida. Selon cette conception, il n’y aurait pas d’injustice, mais seulement un phénomène systématique, économique, sur lequel on n’aurait aucune prise. (Pourtant, même s’agissant d’un épidémie comme celle du sida, on constate que des réactions de mobilisation collectives sont possibles, et que l’on n’est pas obligé d’accepter le fatum, ou d’adhérer à la thèse de la « causalité du destin » qui serait plutôt ici la conséquence d’une paralysie des capacités d’analyse (…) (DÉJOURS, 1998 ; p.20)
	Déjours se positionne contre le fatalisme fonctionnaliste qui considère le chômage comme un phénomène systématique en s’appuyant sur les mobilisations collectives qui ont eu lieu sur le néolibéralisme. 
À mon avis, l’attibution du mallheur du chômage et de l’exclusion à la causalité du destin, à la causalité économique ou à la causalité systémique, ne rélève pas d’une inférence psyco-cognitive individuelle. La thèse de la causalité du destin n’est pas le résultat d’une invention personnelle, d’une spéculation intellectuelle ou d’une recherche scientifique individuelles. Elle est donné au sujet, de l’extérieur.

Pourquoi le discours économiciste sur le malheur, qui attribue la malheur à la causalité du destin et récuse responsabilité et injustice à l’origine dudit malheur, pourquoi ce discours emporte-t-il l’adhésion de nos concitoyens, avec son corollaire, la résignation ou l’absence d’indignation et de mobilisation collective ? 
(DÉJOURS, 1998 ; p.21)

	Déjours prétend répondre à cette question à travers la psychodynamique du travail. « En substance, la psychodynamique du travail suggère que l’adhésion au discours économiciste serait une manifestation du processus de « banalisation du mal ». La banalisation du mal, différent de la banalité du mal, sert à comprendre non le contexte de l’Allemagne nazie, mais la société française contemporaine.  
L’exclusion et le malheur infligés à autrui dans nos sociétés, sans mobilisation politique contre l’injustice, viendraient d’une dissociation réalisée entre malheur et injustice, sous l’effet de la banalisation du mal dans l’exercice des actes civils ordinaires par ceux qui ne sont pas (ou pas encore) victimes de l’exclusion, et qui contribuent à exclure et à aggraver le malheur de fractions de plus en plus importantes de la population. (DÉJOURS , 1998 ; p.22)

	La thése économiciste serait l’indice non seulement d’une résignation ou d’une impuissance, mais « fonctionnerait aussi comme une défense contre la conscience douleureuse de sa propre complicité, de sa propre collaboration et de sa propre responsabilité dans le développement du malheur social » (DÉJOURS, 1998 ; p.23)
	Déjours signale que son analyse sur la banalisation du mal est venue d’un contexte de changements politiques, d’une diminuition des luttes politiques et mobilisations collectives.  Déjours ne voit pas de solution à court terme pour le néoliberalisme, mais indique presque une impossibilité pour l’action qui ne passe pas par un débat sur la banalisation du mal (DÉJOURS, 1998 ; p.24). 
	Quant au chômage, des analystes politiques prévoyaient, en 1980, qu’on ne pourrait pas dépasser 4 % de chômeurs dans la population sans que surgisse une crise politique majeure. En 1998, moment où Déjours écrit, la taux de chômage est de 13 % en France, sans que la population réagisse par des troubles politiques et sociaux. Ça signifie une tendance majeur à tolérer l’intolérable.  
Notre hypothèse consiste en ceci que, depuis 1980, ce n’est pas seulement le taux de chômage qui a changé, ce serait toute la société qui se serait transformée qualitativement, au point de ne plus avoir les mêmes réactions que naguère. Pour être plus précis, nous visons, sous cette formule, essentiellement une évolution des réactions sociales à la souffrance, au malheur et à l’injustice. Évolution qui se caractériserait par l’atténuation des réactions d’indignation, de colère et de mobilisation collective pour l’action en faveur de la solidarité et de la justice, cependant que se développeraient des réactions de réserve, d’hésitation et de perplexité, voire de franche indifférence, ainsi que de tolérance collective à l’inaction et de résignation face à l’injustice et à la souffrance d’autrui. (DÉJOURS, 1998 ; p.26)

	Perplexité, hésitation, indifférence, inaction, résignation, ce sont des mots qui caracterisent le comportement face au mal, que lui empruntent son caracter banal, et qui, à la fois, font de la grand majorité partie prenante dans le système néolibéral.

II La banalité du mal et la banalisation du mal


	La « banalité du mal » est un concept crée, en 1963, par Hanna Arendt, utilisé pour la premier fois à l’ocasion du procès de Eichman. Dans « Eichman à Jerusalem », Hanna Arendt fait la description de l’ancien dignitaire faciste. Il ne ressemble pas à un monstre ou à un pervers. Au contraire, Eichman est extraordinairement commun. Dans les mots de Déjours : « Ce n’est ni un héros, ni un fanatique, ni un malade, ni un grand pervers, ni un paranoïaque, ni un « personnage », Il est sans originalité. Il ne donne prise à aucun commentaire particulier. Il ne suscite pas la curiosité ni le désir de comprendre ou d’interpréter.  Il n’est ni séduisant, ni répugnant. Il est fondamentalement terne» (DÉJOURS, 1998 ; p.155). Il se porte comme un fonctionnaire qui obéît au patron, dans ce cas, l’État nazi. Mais cette obéissance n’est pas aveugle. 
Eichmann, qui n’est pas un psychopathe, n’est pas non plus un simples rouage  du système nazi, en ce sens que, s’il est foncièrement un être obéissant, cette obéissance n’est pas un soumission absolue impliquant l’abolition de tout libre arbitre. Ce n’est pas une debile, ni un aliené comme en rencontre parfois en psychopathologie, il n’est pas privé de volonté, ce n’est pas un robot. 
C’est sans doute cette position intermédiaire qu’occupe Eichmann – entre le leader passioné et l’esclave aliéné – qui fait de lui un sujet terriblement « banal »
(DÉJOURS, 1998 ; p.156)

	Eichman devient un reflet de la société. 
	Ce que Hanna Arendt veut mettre en question est que le mal se dévellope dans l’absence de la pensée. 
Je reprends l’idée arendtienne de banalité du mal pour lui donner d’autres conotations que celles qui émergent de son livre sur Eichmann. Le problème que je veux soulever est précisément celui du consentiment, de la participation, de la collaboration de millions de personnes, au système (…). 
 
En raison de cette même question, j’ai tendance à penser que, avant le problème de la banalité du mal, on doit poser celui de la banalisation du mal, c’est-à-dire du processus grâce auquel un comportament exceptionnel, habituellement entravé par l’action et le comportement de la majorité, peut être érigé en norme de conduite, voire en valeur. 
Or la banalisation du mal suppose, à son origine même, la constituition de conditions spécifiques pour pouvoir viser le consentement et la coopération de tous à ces conduites et à leur valorisation social. 
(DÉJOURS, 1998 ; p.157)

	Déjours critique le caractére subjectif et localisé du concept de banalité du mal chez Arendt, fondé sur la personnalité. Au contraire, il réclame l’universalité du comportament genéré par des causes objectives, la valorisation social et la coopération.
 
Je fais un subir à la notion arendtienne, incontestablement, un glissement sémantique, mon problème initial ne relevant pas de psychologie individuelle, ni du souhait de comprendre la personnalité spécifique d’Eichmann. Mon problème est de comprendre une conduite de masse qui se moque des singularités et des personnalités individuelles, qui les « transcende » en quelque sorte, et fait apparaître la personnalité comme de peu de poids au regard d’une conduite d’adhésion collective. 
Ma thèse est que le dénominateur commun à toutes ces personnes, c’est le travail, et que, à partir de la psycho-dynamique du rapport au travail, on peut, peut-être, comprendre comment la « banalisationi » du mal a été possible. (DÉJOURS, 1998 ; p.157)
	
	La « banalité du mal » signifie donc « l’absence, la suspension ou l’effacement de la faculté de penser qui peuvent accompagner les actes de barbarie ou, plus généralement, l’exercice du mal » (DÉJOURS, 1998 ; p.195). Par « banalisation du mal » on doit comprendre « l’atténuation de l’indignation face à l’injustice et au mal, mais, au-délà, le processus qui, d’une part, dédramatise le mal (alors qu’il ne devrait jamais être dédramatisé), et qui, d’autre part, mobilise progressivement une quantité croissante de personnes, au service de l’accomplissement du mal, et fait d’elles des « collaborateurs » (DÉJOURS, 1998 ; p.196). La conduite de masse dont parle Déjours, est justement le comportement de consentiment avec l’injustice social, dont les conditions de travail sur le néolibéralisme sont le meilleur exemple, par sa position globale. 

III Le mensonge institué

L’acceptation sociale de l’injustice est fondé, selon Déjours, sur une mensonge institué qui opère par plusieurs stratégies. Ce mensonge caractérise le dispositif qui protège la conscience de sa complicité avec le système.

Certains désordres produisent un âbime entre la communication idéale et la communication, dans la vie commune, mais selon Déjours, la rationalité communicationnelle, telle que la formule Habermas, reste un organisateur idéal pour la discussion. Entre ces désordres, on recontre ce qu’il appelle la mensonge institué. « Le mensonge consiste à produire des pratiques discursives qui vont occuper l’espace laissé vacant par le silence des travailleurs sur le réel et l’effacement des retours d’expérience. Le mensonge consiste à décrire la production (fabrication ou service) à partir des résultats et non à partir des activités dont ils sont issus » (DÉJOURS, 1998 ; p.87). La mensonge consiste à un changement de perspective.


IV. Une stratégie collective de défense : la virilité

Ainsi donc, pour ne pas courir le risque de ne plus être reconnus par les autres hommes comme des hommes, pour ne pas perdre les benéfices de l’appartenance à la communauté des hommes virils, pour ne pas risquer de se trouver exclus et méprisés sexuellement ni tenus pour lâches, poltrons ou couards – non seulement pas les hommes mais aussi par les femmes – des hommes, en très grand nombre, acceptent d’apporter leur concours au « sale boulot » et de devenir ainsi des « collaborateurs » de la souffrance et de l’injustice infligées à autrui. (DÉJOOURS, 1998 ; p.123)
	
	Ne pas perdre sa virilité – c’est la motivation principal que Déjours rencontre chez ses clients. Déjours fait une distinction entre ne pas perdre sa virilité et combattre pour elle. « Ne pas perdre sa virilité » est une stratégie de lutte ou de défense contre la souffrance, avec le risque de pert de l’identité sexuelle. « Nous sommes encore loin du plaisir, de la fierté et de l’orgueil de l’homme courageux, de celui qui jouit du triomphe » (DÉJOURS, 1998, p.123)
Toutefois, l’investigation suprès des « collaborateurs » suggère que, dans la configuration sociale et psychologique que nous avons envisagée, les braves ges ne se sententant pas tous très fier de leur conduite. Au contraire, cela peut même aller jusqu’à la soufrance morale d’avoir à apporter son concours à des actes qu’on reprouve. Échapper de cette façon à la menace de castration symbolique n’abolit pas automatiquement le sens moral. À ce point, d’ailleurs, que la conscience claire de cette situation psychologique apparaisse à son tour comme intenable (…).(DÉJOURS, 1998 ; p.124)

	La question de la virilité (de ne pas la perdre) est indissociable d’un grand tension mentale, une fois que l’individu se sent obligé à collaborer avec un système qu’il reprouve. Pour Déjours, suivant dans ce point Hanna Arendt, cette conduite advient d’un « peur de la responsabilité » (DÉJOURS, 1998 ; p.124). 
	La stratégie mentale consiste donc de passer d’une situation d’injustice à une rationalisation du mal : « Pour continuer à vivre psychiquement tout en participant au « sale boulot » dans l’entreprise moderne et en conservant leur sens moral, beaucoup d’hommes et de femmes qui adoptent ces comportements virils élaborent collectivement des « idéologies défensives » grâce auquelles est construite la rationalisation du mal » (DÉJOURS, 1998 ; p.124). Ce processus est une stratégie collective de défense.


III Dé-banalisation du mal 

Déjours met en évidence quatre manières pour lutter contre la banalisation du mal. La stratégie de Déjours est d’essayer de deconstruire la mensoge institué et l’hegemonie de la virilité: « La première [direction] consiste à proceder systématiquement et rigouresement à la déconstruction de la distorsion communicationnelle dans les entreprises et les organisations » (DÉJOURS ; 1998, p.193). On a vu que la distorsion communicationnelle est un des dispositifs du mensonge.

La plupart de ceux qu’alimentent les médias du mensonge ont une claire perception de ce mensonge. (…)

Il me semble donc que c’est à ce niveau que devrait porter, en priorité, la discussion dans les espaces disponibles, tant dans l’entreprise que dans les syndicats ou dans l’espace public. (…)

En s’attaquant à la distorsion communicationnelle, on peut raisonnablement escompter un réveil de la communauté scientifique pour le travail, qui tend à devenir un instrument majeur d’aprentissage à l’injustice dans les sociétés néolibérales. (DÉJOURS, 1998 ; p.192)

La deuxième manière consiste « à travailler directement sur la déconstruction de la virilité comme mensonge » (DÉJOURS, 1998 ; p.194). Déjours indique le travail de Daniel Welzer-Lang.

Nous avons soutenu l’idée que la virilité occupe une place au moins aussi importante que le mensonge, dans la mesure où, sans elle, il n’y a pas de possibilité de faire passer le mal pour le bien. Mais la virilité est en soi un mensonge, c’est ce qu’il ne faut pas omettre dans l’analyse. Tout le reste du dispositif de distorsion communicationnelle joue comme potentialisateur du mensonge de la virilité et ne peut se substituer à lui. (DÉJOURS, 1998 ; p.193)

Le troisième point se relatione avec la question du cynisme, que nous n’abordons pas ici. Dans le quatrième point, il s’agit d’une tournage feministe de Déjours :

Conviendrait-il enfin de reprendre la question éthique et philosophique de ce que serait le courage débarassé de la virilité, en partant de l’analyse du courage au féminin, et de l’analyse de formes spécifiques de construction du courage chez les femmes, qui pourraient bien être caracterisées par l’invention de conduites associant reconnaissance de la perception de la souffrance, prudence, détermination, obstination et pudeur, c’est-à-dire des conduites bien différentes de celle de la virilité, en ce qu’elles ne tentent pas d’opposer de déni à la souffrance ni à la peur, ne proposent pas de recours à la violence, ne procèdent pas à la rationalisation et ne s’inscrivent pas dans la recherche de la gloire » (DÉJOURS,1998 ; p.194)

La déconstruction (concept de Derrida) et le tournage feministe sont ainsi des façons de dé-banaliser le mal. La deconstruction a comme un de ses principaux objects la lutte contre le phalocentrisme, en considérant sa centralité dans l’ institution de la raison occidentale moderne. Mais la déconstruction n’a pas un caractère uniquement négatif, la déconstruction du phalocentrisme est indissociable de la recherche pour de nouvelles sources de valeurs. Le féminisme apparaît comme un de ces source de formulation éthique qui ne passe pas par la survalorisation de la virilité.

 
 
 

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